Une performance qui aiguise les sens du spectateur, tous ses sens, tout en affûtant ses perceptions. Watadour emprunte tout autant à la danse et aux mouvements, qu’aux sons, à la musique, aux dessins, à la scénographie, à la conception, aux arts visuels et graphiques, à la création. Watadour, et la terre tourne, et elle continue de tourner entraînant tous ses habitants dans ses mouvements, ses manipulations, en perpétuelle lutte, en perpétuels possibles, tels des marionnettes, des mannequins, des pantomimes, qui tentent encore et encore de lutter, de s’accrocher, de continuer à vivre.
Elle est suspendue dans le vide, une corde, une poulie. Il est allongé sur une plaque circulaire disposée à hauteur de quelques centimètres de la scène. Le corps de Bassam Bou Diab se tord doucement, violemment, fébrilement, dans une sorte de douleur indicible. Mia Habis, elle, reste inerte, suspendue, un corps sans vie, comme dépossédé de soi. Des corps manipulés, dans l’impossibilité d’une rencontre, d’une rencontre corporelle, d’un amour à peine né qu’il en devient impossible. Un attouchement qui n’en est pas un, qui ne peut en être un, parce que les forces manipulatrices de l’univers le tuent avant même sa naissance, avant même sa possibilité. En quelques minutes, les premières minutes de la performance, Watadour suggère le possible et l’impossible, l’imaginable et l’inimaginable.
D’illusion en illusion
Watadour est un projet qui regroupe plusieurs artistes de différentes disciplines autour d’un concept novateur et audacieux. Un concept qui ne manque pas de frissons et de souffles coupés, de puissance et de puissance de suggestion. Jeux visuels, jeux de l’illusion, à plus d’un niveau, le spectateur s’aperçoit, d’un coup, que cette plaque circulaire qui, au début du spectacle, se positionnait en parallèle au sol, se trouve actuellement surélevée d’un côté, penchée, glissant à la verticale. On se promet de faire attention à ce détail, au moment où elle s’élèvera encore à la verticale. Mais le changement s’opère de manière imperceptible, se dérobant au regard, à la perception même, pour imposer, encore une fois, ses revirements. Et c’est là que réside une des forces de la scénographie de Watadour, signée Nasser Soumi. Tout comme les personnages sont happés par l’univers, le spectateur est happé par la scène où éclôt la représentation de son existence, qu’il voit se dérouler, malgré lui.